En 2015, les travaux de l'équipe de Leslie Lyons du laboratoire UC Davis ont bouleversé le modèle génétique jusqu'ici supposé du blanc uni et de la panachure blanche. Le modèle retenu faisait alors état de trois gènes distincts : W (White), S (Spotting) et KIT que l'on pensait uniquement lié au gantage typique du Sacré de Birmanie et que l'on nommait donc communément "Gloves". Chacun de ces gènes possédait traditionnellement deux allèles : pour White, W produisait une robe d'un blanc uni, tandis que w+ donnait un chat entièrement coloré ; pour S, l'allèle W était responsable de la panachure blanche et s+ de son absence ; Gloves comptait gl pour un chat ganté et Gl+ pour un chat non ganté.
Suite aux recherches de l'équipe en question, il s'avère qu'il existe en réalité un seul et même gène, comptant quatre allèles :
- Dw (Dominant White) : chat blanc
- Ws (White Spotting) : chat à panachure blanche, dit "particolore"
- w: chat entièrement coloré
- gl : chat ganté
L'allèle gl avait été le premier à être relié au locus KIT en 2010, mais il fallut attendre cinq ans pour que les autres allèles supposés soient identifiés comme faisant partie de la même série allèlique.
Le blanc uni (DW) est dominant sur la panachure (Ws), l’absence totale de blanc (w) ainsi que sur les gants (gl), la panachure est dominante sur le gantage et sur l’absence totale de blanc. Le gantage est l’allèle le plus récessif de la série.
Un test ADN est disponible chez UC Davis. Voici la traduction des informations disponibles sur leur site.
En présence de l’allèle sauvage (ndlr : w, absence de blanc), une seule copie de Ws suffit à produire une panachure blanche. Si
l’étendue de la panachure n’est pas intrinsèquement liée au nombre de copies, certaines données empiriques laissent supposer
que deux copies de Ws produisent une panachure plus importante. Il n’existe cependant pas de corrélation entre les différents
patrons de panachure et le nombre de copies de Ws : le ou les gène(s) impliqué(s) restent inconnus. De plus, tous les types de
taches blanches ne sont pas dus à ces allèles puisque des mutations sur d’autres gènes peuvent produire ces phénotypes. Quel que soit l’autre allèle de la paire, une copie de DW produit un chat entièrement blanc.
Le blanc uni est distinct de l’albinisme (Ca) qui correspond à une mutation sur un autre gène, qui n’a pas d’impact connu sur l’audition. Alors qu’une ou deux copies de DW produiront un chat blanc dans les deux cas, différents degrés de déficience auditive ont été observés. Vis-à-vis d’analyses généalogiques plus poussées, environ 75% des chats possédant deux copies de DW étaient sourds - le reste souffrait au moins de malentendance. Presque 60% des chats ne présentant qu’une copie de DW avaient une audition normale, contre 21% de sourds et 17% de malentendants. Quant aux chats possédant une copie de DW et une copie de Ws, 1/3 avaient une audition normale, 1/3 étaient sourds, 1/3 étaient malentendants.
Au stade embryonnaire, lors de la différenciation cellulaire, les cellules migrent de la crête neurale vers leur emplacement définitif en vue de leur spécialisation : or, chez le chat blanc, l'allèle Dw perturbe la migration et la division des futures cellules pigmentaires, lesquelles ne pourront alors pas produire de pigment, ne laissant apparaître qu'une robe blanche.
Chez le chat particolore, les cellules migrent, mais ont une fréquence de division moindre, réduisant la surface pigmentée. L'allèle gl correspond à une restriction de ce phénomène aux parties les plus extrêmes du corps, d'où cette panachure restreinte aux pieds.
Le blanc dominant
Concernant Dw, la règle est la même que pour l’ensemble des allèles se transmettant sur le mode dominant : pour qu'il y ait du blanc dans la portée, il faut absolument qu'au moins un des deux parents soit blanc. Un blanc portera obligatoirement w si l'autre parent est coloré. Mais étant donné le modèle génétique désormais bien connu, un blanc peut également porter Ws ou même gl !
Nous verrons toutefois qu'il est déconseillé de marier deux blancs entre eux.
La particularité la plus notable du blanc est de rendre muette l'expression de toute autre couleur, c'est-à-dire qu'un chat blanc peut être génétiquement de n'importe quelle couleur sous son pelage blanc. W suffit à lui seul à masquer la "vraie" couleur : on dit qu'il est épistatique.
À la naissance, les chatons blancs ont souvent une "casquette" sur la tête. Cette petite tache révèle la couleur du chat et s'estompe en grandissant. Des tests génétiques sur certains gènes (B, D, A...) sont également possibles pour se donner une idée de la couleur cachée. Les chatons peuvent aussi être révélateurs, notamment pour les gènes pour lesquels il n'existe pas encore de test, comme le gène I dont l'allèle dominant donne le smoke, et le silver lorsque couplé au tabby. Si l'on a, par exemple, un chat blanc cachant un tabby, il pourra donner des chatons eux-mêmes tabby, y compris avec un partenaire non agouti. Vous pouvez donc vérifier la couleur des parents de votre chat(te) blanch(e), ou demander des colortests (selon la disponibilité de tel ou tel test) pour déterminer son génotype si les couleurs obtenues avec certains accouplements vous paraissent surprenantes. Il est effectivement possible d'avoir des surprises étant donné la nature épistatique du blanc.
Eternity Ever White du Marais aux Elfes, British Shorthair blanc - Dominique Delaveau
La casquette révèle que ce chat est génétiquement lilac
Si tous les blancs sont... Blancs, avec des coussinets et une truffe roses, ils n'ont pas tous la même couleur d'yeux. On peut trouver des yeux verts, or, bleus, vairons/impairs (deux couleurs pour un même oeil, ou un oeil bleu et l'autre vert ou or).
La teinte des yeux est entre autre dépendante de la variété du chat sous le blanc : un animal génétiquement colorpoint par exemple, aura les yeux bleus. Pour un blanc cachant un mink, on peut avoir des yeux impairs un peu plus singuliers : un oeil aigue-marine, couleur typique du mink, le second bleu.
Dans d'autres cas, ce peut être W lui-même qui donne le bleu en perturbant, au stade embryonnaire, la migration des cellules qui colorent les yeux. Ces cellules n'ont toutefois pas pour origine le même tissu que celles assurant la pigmentation du poil, c'est pourquoi des yeux colorés sont possibles chez le chat blanc.
Don Giovanni Solal des As, British Longhair blanc aux yeux impairs - Thierry Teisseire
L'allèle W peut également affecter le voyage des cellules précurseurs de l'oreille interne, causant alors une surdité unilatérale (qui concerne une seule oreille) ou bilatérale (les deux oreilles sont touchées). Il y a ainsi dégénérescence de l'oreille interne qui ne se développera pas après la naissance.
Au niveau des statistiques, on observe que les chats aux yeux colorés sont moins fréquemment atteints, et que les sujets aux yeux bleus sont plus souvent touchés. La fréquence de la surdité pour les animaux aux yeux impairs se situe entre les deux, avec tendance à concerner le côté de l'oeil bleu. Une hypothèse serait que si l'iris est coloré, il y a des chances pour que les cellules constituants la future oreille aient pu migrer de façon à ce que l'audition soit opérationnelle. Un chaton né avec une grande "casquette" aurait aussi moins de risques de présenter une surdité. Cependant, malgré ces observations il n'existe pas de règle véritable et un chat ayant des yeux bleus n'est pas obligatoirement sourd !
Il convient ainsi de tester l’ouïe de tout chat blanc, en particulier des reproducteurs, et d’éviter de marier deux blancs entre eux afin de limiter les risques.
La panachure blanche
Les chats à panachure blanche sont communément appelés « particolores ». Le mode de transmission implique que tout chat particolore est issu soit d’au moins un parent qui l’est lui-même, soit d'un blanc uni porteur de Ws. Un mariage entre un parent hétérozygote non blanc (génotype Ws-s : une copie de chaque) et un partenaire ne possédant pas Ws donne des chatons ayant chacun une chance sur deux d’être particolore, une chance sur deux de ne pas l’être. Un chat homozygote pour Ws (génotype WsWs) donnera uniquement des chatons particolores.
Chaton Maine Coon brown mackerel tabby et blanc - Chatterie du Comte des Fées
L’expression de cet allèle est très variable : bottines avec ventre et collerette blancs, patron bicolore (30 à 50% du corps blanc), patron arlequin (plus de 50 % de blanc : queue, haut de tête colorés, quelques taches de couleurs), patron van (plus de 80%)…
Les patrons arlequin et van sont traditionnellement associés à une homozygotie pour Ws, ce qui reste encore à vérifier.
Il existe une multitude de possibilités de placement du blanc au sein d’un même patron, par exemple, un large « V inversé » sur la face d’un bicolore ou une « flamme » étroite, etc.
La truffe et les coussinets sont, selon la répartition de la panachure, de la couleur de base, roses, ou roses tachetés de la couleur de base.
Chaton British Longhair noir et blanc- Chatterie de Candybelle
La perturbation de la division des cellules pigmentaires produites par Ws explique le fait que les parties colorées se situent principalement dans les zones les plus proches de la région dorsale et qu’on ne voit jamais, par exemple, de particolore à dos entièrement blanc et au ventre coloré. Cette réduction du nombre de cellules pigmentaires explique également les plages de couleurs plus larges des chattes tortie particolores (dites « tricolores » ou encore « calico ») : la concurrence pour coloniser le territoire cutané du fœtus étant moins rude, chaque clone cellulaire aura davantage de place pour s’étaler, donnant ces plaques plus larges et souvent bien délimitées (voir article « Le gène O »).
Comme les cellules responsables de la pigmentation des yeux sont également susceptibles d’être concernées, un chat particolore peut avoir les yeux impairs ou bleus, ou conserver sa couleur d’iris « d’origine ».
La question du « comment » du placement des panachures blanches en général pourrait se poser. L’observation de répartitions semblables au sein de colonies de chats sauvages, la persistance de « défauts » de marquage, semblent pencher en faveur d’un « terrain » héréditaire, modulé par des polygènes qui pourraient influencer le voyage des cellules. La sélection sur la quantité de blanc n’étant cependant pas toujours facile, et les chats particolores issus de clonage n’ayant pas exactement la même répartition que leur « original », on pourrait supposer qu’il reste une part d’aléatoire due au caractère moins contrôlable du comportement des cellules pigmentaires au stade embryonnaire.
Il est toutefois conseillé de rester dans une optique de sélection rigoureuse, selon les critères de chaque race pour la répartition de la panachure.
Le gantage
L'allèle gl étant le plus récessif de la série, deux chats gantés donneront toujours des petits gantés - à des degrés certes plus ou moins divers. Tous les Sacrés de Birmanie sont donc homozygotes pour gl.
En plus du gantage, la majorité des Birmans présentent, de façon moins évidente, un plastron blanc sur le ventre, qui peut passer inaperçu s'il est de dimensions modérées et/ou si le chat est d'une robe claire.
Albafeles Xrysos, Sacré de Birmanie seal point - Paloma.C
Des porteurs de la mutation ont été identifiés, à faible fréquence au sein de plusieurs autres races, comme le Mau Égyptien, le Maine Coon, le Manx, le Seychellois, le Siamois, le Sibérien, le Sphynx ou encore le Turc du Lac de Van.
De façon occasionnelle, des chatons de ces races s’avèrent présenter un semblant de gantage, avec des extrémités de phalanges blanches. Il pourrait être intéressant de tester génétiquement de tels sujets, ou bien des reproducteurs ayant déjà donné naissance à des chatons exprimant cette caractéristique, afin de déterminer si celle-ci est bien liée à l’allèle associé d’ordinaire au Sacré de Birmanie. Si le résultat du test penche en faveur du gène gloves, il sera alors possible de mieux contrôler l’occurrence du gantage, puisque son support génétique aura été préalablement identifié et sera traçable par le biais du test. Au regard du standard des races en question, le gantage de gl est considéré comme un défaut, bien que certaines acceptent une panachure blanche, dont un gantage dû à Ws.
Ws peut en effet plus occasionnellement produire un phénotype similaire à gl. Le blanc de gl étant cependant plus contrôlé, le gantage lié à Ws a tendance à s'accompagner d'autres zones blanches plus envahissantes. N'oublions pas non plus que Ws, contrairement à gl, est dominant sur w. C'est d'ailleurs là l'une des différences notables entre le Sacré de Birmanie et le Ragdoll, dont le patron "mitted" se transmet sur le mode dominant, bien que l'existence d'un cinquième allèle similaire à Ws mais spécifique au Ragdoll soit encore débattue.
Le gantage du Sacré de Birmanie ne va pourtant pas sans son petit lot de difficultés : même si gl est un exemple de panachure très contrôlé, la "qualité" du gantage n'est pas figée dans la pierre, et certains Birmans présentent ainsi un gantage trop court, ou au contraire trop haut, ou encore de petits crochets ou lacets. Dans l'idéal, le gantage doit s'arrêter en ligne droite à l'articulation des doigts. De la même manière que pour Ws, des polygènes ainsi que le comportement des cellules à l'état embryonnaire entrent probablement en compte. On remarque toutefois qu'il est plus difficile de rectifier un gantage un peu court qu'un gantage haut ou une remontée conséquente, malgré la conviction répandue au sein de la communauté des éleveurs, qui a tendance à considérer que la qualité du gantage est purement aléatoire et n'a pas de fondement génétique.
D'autres défauts de répartition du blanc revêtent un caractère plus éliminatoire pour la reproduction, tels qu'un pompom blanc au bout de la queue, ou une tache blanche nommée "goutte de lait" sur le menton, le dessus du nez ou ses alentours, ou encore sur les parties génitales. Une hypothèse : il pourrait s'agir d'un débordement de l'action de gl. Là encore, ces défauts sont plus difficiles à éradiquer qu'un gantage un peu trop court. Ils ne sont toutefois pas sans rappeler les fameux "médaillons blancs" chez certains chats entièrement colorés.
Et ces médaillons blancs alors ?
Certains chats présentent cependant des taches blanches isolées, plus particulièrement sur le poitrail ou le ventre, alors que l’allèle Ws ne peut manifestement pas être présent. Rappelons qu'se transmet en effet sur le mode dominant : un chaton à panachure blanche a toujours au moins un parent présentant lui-même une panachure. Le gantage du Sacré de Birmanie rentre également dans ce type de taches blanches « particulières », mais avec une nature génétique peut-être différente des autres taches.
De façon similaire aux panachures blanches liées à Ws, ces « white lockets » (médaillons blancs) présentent quelques variations, entre une poignée de poils blancs sur le poitrail, ou un « bavoir », accompagné ou non d’une « culotte » blanche entre les pattes avants et/ou arrières. Ils n’atteignent toutefois jamais l’étendue des panachures induites par S, tout comme il est peu probable que l’allèle Ws puisse donner de simples médaillons. On ignore actuellement si les culottes et les médaillons sur le poitrail relèvent d’un même gène ou ont un support génétique différent l’un de l’autre.
Diane, chatte de maison noire à white locket - Nadine Morales
Ces taches figurent, en outre, parmi les fautes et défauts généraux éliminatoires en exposition : tout chat de race en présentant une contraire aux particularités énumérées par le standard est censé ne pas pouvoir prétendre à un parcours en exposition, voire à une carrière en reproduction en fonction de la race concernée. Elles sont toutefois à différencier des racines blanches des smoke, ou encore de la dépigmentation occasionnée par un vitiligo, une affection de la peau.
Dès lors, comment expliquer ces taches occasionnellement visibles y compris sur des individus non issus d’un particolore, et que les standards de la plupart des races listent comme défaut sous l'intitulé "tache blanche chez le chat non particolore" ?
L’hypothèse d’un allèle récessif est régulièrement retenue. Le support génétique exact de ces médaillons et culottes reste cependant très imprécis, d’autant que ces deux types de tache peuvent être liés à un même gène à expression variable, d'un autre allèle de KIT ou découler d’au moins deux gènes distincts.
Le gène lié au gantage ne semble pas avoir de liens avec les médaillons blancs classiques de façon indissociable. S’il est possible de cumuler gantage et médaillon, l’un peut aller sans l’autre. Or, si gloves est présent, il donne toujours au moins quelques bouts de doigt blancs, ce qui n’est pas le cas de la plupart des chats présentant un médaillon. Aux précédents questionnement s'ajoute donc la possibilité d'une distinction génétique entre les taches blanches "indésirables" du Birman et les lockets classiques, le premier dû à un débordement de gl, l'autre à un phénomène génétique différent
Les white lockets peuvent survenir dans la plupart des races, ainsi que chez le chat de maison.